BANDE A PART est une histoire à la fois drôle, grave et triste, mais elle reste très crédible. Dès les 1ères minute, le narrateur/réalisateur souligne déjà malgré tout la nature fictive de son histoire. Il s'amuse à la résumer en mots clés, s'en détache le temps d'une parenthèse et va même jusqu'à s'adresser aux spectateurs qui seraient arrivés dans la salle de projection en retard. Comme Alphaville, le 7ème film de Jean-Luc Godard est un hommage iconoclaste au film de genre. Ses héros imaginent la vie comme un film, échangeant constamment les répliques assassines d'un scénario vif et truffé de clins d'œil qu'ils écrivent sur-le-champ, dans l'inspiration du moment Ainsi, Bande à part dérape à l'instar de ses héros de la comédie à la tragédie. Les signes avant-coureurs de la triste tournure des événements traversent de part et d'autre l'œuvre, mais la surprise demeure totale, la fin, entre action et suspense polaresques, et chassé-croisé amoureux, étant captivante. Au delà du scénario, il y a la qualité évidente, et indéniable de la mise en scène. En effet, "Bande à part" bénéficie d'un noir et blanc magnifique, qui sublime Paris et ses alentours, et que l'on doit à la très belle photographie de Raoul Cotard. La scène la plus sympathique du film est toute simple dans sa réalisation, encore fallait-il y penser et la faire se marier avec l’esprit du film dans son ensemble. Le trio se prélasse au café et s’essaye à une minute de silence… qui paraît une éternité – avec Godard qui coupe littéralement le son du film pendant l’exercice – avant d’improviser un séduisant Madison sur la piste. Il y aussi la musique, swingante, et délicieuse à souhait qui renforce la beauté du film. Et que reprocher aux interprétations, toutes très bonnes ? Aucune longueur, un peu d'humour et de naïveté touchante. Voilà encore un Godard à ne pas manquer !
BANDE A PART - JEAN LUC GODARD >> 4/5