lundi 16 juillet 2012

FAHRENHEIT 451



451 degrés Fahrenheit représentent la température à laquelle un livre s'enflamme et se consume. Dans cette société future où la lecture, source de questionnement et de réflexion, est considérée comme un acte antisocial, un corps spécial de pompiers est chargé de brûler tous les livres dont la détention est interdite pour le bien collectif. Montag, le pompier pyromane, se met pourtant à rêver d'un monde différent, qui ne bannirait pas la littérature et l'imaginaire au profit d'un bonheur immédiatement consommable. Il devient dès lors un dangereux criminel, impitoyablement pourchassé par une société qui désavoue son passé.

La nouvelle a souvent été interprétée comme une condamnation du maccarthisme. Elle présente de nombreux points communs avec la situation aux États-Unis en 1952 ; en effet, dans l’œuvre, les intellectuels sont éliminés sur dénonciation de leurs voisins dans le but d’assurer la sécurité nationale (une seule parole, donc pas de naissance de mouvements de contestation) et le « bonheur commun ». 


Ray Bradbury a cependant contesté cette interprétation. Il a d'ailleurs déclaré à la fin des années 50 que son roman traitait de l'aliénation des gens par les médias : " In writing the short novel Fahrenheit 451 I thought I was describing a world that might evolve in four or five decades. But only a few weeks ago, in Beverly Hills one night, a husband and wife passed me, walking their dog. I stood staring after them, absolutely stunned. The woman held in one hand a small cigarette-package-sized radio, its antenna quivering. From this sprang tiny copper wires which ended in a dainty cone plugged into her right ear. There she was, oblivious to man and dog, listening to far winds and whispers and soap-opera cries, sleep-walking, helped up and down curbs by a husband who might just as well not have been there. This was not fiction. "


Vision qu'il a réaffirmé dans une interview en 2007, disant que son roman explorait les effets néfastes de la télévision et des médias de masse sur la lecture de littérature.

Dans Fahrenheit 451, Bradbury décrit une société totalement déshumanisée, qui vit dans l'illusion du bonheur. Pas de lieu précis, ni de temps déterminé pour la société de Fahrenheit 451. Comme en apesanteur. Sans passé, sans histoire, sans identité. Simplement aseptisée. L'amour a sombré, Montag et sa femme par exemple ne se rappellent plus où ils se sont rencontrés, les amies de Mildred voient leurs enfants comme des fardeaux. Les gens se sont désintéressés de la culture. A force de vouloir trop consommer, petit à petit des résumés sont apparus pour des œuvres, puis des résumés de résumés pour finalement réduire une œuvre à son plus simple appareil. Ils préfèrent faire du sport ou regarder la télévision, ils se contentent de l'opinion officielle et ne réfléchissent plus, ne communiquent plus entre eux. Dans Fahrenheit 451, tout se ressemble et se répète à l’infini, les hommes et les femmes qui sortent de leurs pavillons à l’identique ressemblent à des robots, sortis du même moule. Pour Bradbury, tenter d'inverser le processus en lançant une révolution n'est pas un projet viable, le régime étant trop puissant, il ne perd cependant pas espoir, il faut attendre des temps meilleurs, la résistance,pacifique, se fait par le biais des hommes livres qui en mémorisant les livres finissent par faire corps avec eux.

L'ambiance de Fahrenheit 45, sans atteindre leur vertigineuse ampleur, est assez proche de celle de 1984 ou encore du Procès. Si le roman de Bradbury est un roman d'anticipation, il ne s'avère (malheureusement) pas si éloigné de la réalité d'aujourd'hui, se révélant ainsi particulièrement angoissant et prenant. Les développements technologiques qu'il annonce dans son roman (les écrans plats par exemple) sont on ne peut plus tangibles de nos jours (Bradbury, extralucide ?). Véritable hymne à la liberté individuelle et au pouvoir des livres, Fahrenheit 451 est un classique à découvrir absolument.




L'adaptation cinématographique de Fahrenheit 451 de François Truffaut est fidèle au roman, il convient tout de même de signaler que quelques éléments ont été changés :  on évolue plutôt dans une société parallèle et non futuriste, le personnage de Guy Montag est dès le départ présenté comme un rêveur en quête de culture, le personnage de Faber est totalement absent tout comme le Limier. On ne s'ennuie pas et le film est plutôt agréable à regarder. Seul long métrage tourné en langue anglaise pour Truffaut, ce "Fahrenheit 451" parvient à dégager une ambiance à la fois froide et poétique, renforcée par la musique de Bernard Herrmann et par le mélange d'accents des interprètes. Emaillé de quelques séquences marquantes (la vieille dame se consumant parmi ses bouquins, l’incendie chez Montag et le final), Fahrenheit 451 est réussi !



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