mercredi 28 décembre 2011

SUBMARINE - RICHARD AYOADE


Oliver Tate a 15 ans. Sa tête de Beatles cadavérique, son accent anglais à couper au couteau et son air de poète incompris font de lui l’objet de nombreuses moqueries au lycée, et pour cause : Oliver Tate est dans un autre monde, le sien. Il se rêve à la fois acteur et réalisateur de sa propre vie, héros branché d’un navet sans nom dont il ferait la voix off et où défileraient des paysages de bord de mer sur un air de rock-indé. Mais la réalité est toute autre, et dans la réalité, Oliver est un garçon totalement désemparé sous des airs d’agité du bocal à tendances névrotiques. Et pour cause : ses parents traversent une crise de couple importante doublée d’une activité sexuelle au point mort, et Oliver soupçonne sa mère de flirter avec le nouveau voisin, un espèce de Jean-Claude Van Damme à nuque longue qui donne des conférences mystiques dans un décor de discothèque. En parallèle, et comme si cela ne suffisait pas, Oliver connaît des difficultés à convaincre Jordana, sa petite amie, une brunette pyromane et un brin dure à cuire, de coucher avec lui une bonne fois pour toutes. Nageant à contre-courant dans son océan de problèmes, Oliver Tate découvre que sa vie ne correspond en rien au script qu’il avait imaginé.. ou presque.


Submarine nous entraine dans un univers british et décalé, le tout porté par un humour décapant voire même grinçant et une bande-son à tomber, composée par Alex Turner. Le film gravite autour d'Oliver, un ado tour à tour adorable, touchant ou détestable. Richard Ayoade a choisi d'en faire un anti-héros à la Salinger. Oliver pleure, ne fait pas ce qu'on attend de lui, se laisse aller, ... Cultivé, curieux, sans limite, en avance sur son âge, romanesque, un peu égoiste, aventureux, Oliver est un personnage complexe et intéressant. Le jeune Craig Roberts sur lequel repose donc tout le film est une vraie révélation, se confondant totalement avec l'étonnant Oliver. Mais les seconds rôles ne sont pas pour autant en reste, à commencer par Yasmin Paige, fabuleuse petite diablotine dans le rôle de Jordana mais aussi Sally Hawkins et Noah Taylor absolument parfaits en parents totalement déconnectés de la réalité. La mise en scène de Submarine est également originale. D'abord par la voix off (le film est raconté à la première personne) mais aussi par le biais d'une caméra toujours en mouvement. Le réalisateur instaure notamment un hilarant contraste entre le flux de pensée de son personnage et les images effectives de sa vie qui se déroule… Il soigne certains effets, toujours efficaces, transformant parfois son héros en véritable psychopathe ou sa matière filmique en véritable thriller, par le biais d’un montage frénétique et délirant. Le film a aussi des airs de chronique adolescente, version parodique bien sûr : alors qu’Oliver décrit une scène de son futur « biopic » filmée à la grue s’éloignant de lui dans un grand mouvement aérien, on ne voit à l’écran qu’un pauvre effet de zoom arrière, car comme il le dit, le film de sa vie n’a que ce genre de moyens pour le moment… Submarine est loufoque et profondément humain. Les tromperies, les mensonges et les coups-bas sont racontés avec simplicité et naturel. Les dialogues sont paradoxalement de grande qualité, à la fois tordants et second degré. Le film est également hanté par une mélancolie omniprésente, les paysages de bord de mer qui défilent indifféremment, le héros romantique en proie à des doutes et à des interrogations qu'il ne maitrise pas, le côté "amateur" et surtout la B.O. d'une beauté indéniable ne font que renforcer cette impression. Entre références à la Nouvelle Vague et humour british contaminé par une ironie noire, Submarine, charismatique et talentueux se révèle un pur plaisir et vaut très largement son pesant de cachuètes ! 1h47 de bonheur ;-)


Et puis bon je suis totalement amoureuse des chansons composées pour l'occasion par Alex Turner

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SUBMARINE, RICHARD AYOADE (date de sortie : 20 juillet 2011) >> 3.9/5

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